Le groupe pharmaceutique Sanofi a annoncé la suppression de 1.700 postes en Europe sur trois ans, dont un millier en France. Cette réduction d'effectifs reflète l'abandon de pans d'activité jugés peu rentables malgré leur intérêt sanitaire selon Jean-Louis Peyren, coordinateur adjoint de la CGT au sein de l'entreprise.
Le géant pharmaceutique français Sanofi a annoncé vendredi 26 juin la suppression de 1.700 emplois en Europe, dont un millier en France (sur 25.000 au total dans l'Hexagone). L'entreprise mettra en place un plan de départs sur trois ans, "exclusivement sur la base du volontariat", a indiqué auprès de l'AFP Olivier Bogillot, le président de Sanofi France. Le dirigeant précise que ces réductions se feront sur des postes "en CDI pour la plupart, notamment des fonctions support, commerciales et des plateformes liées à la recherches", et sans fermeture d'usine. Ces conditions doivent être précisées lundi, lors d'une réunion avec les syndicats. A rebours de ces coupes, Sanofi avait annoncé mi-juin un investissement de 610 millions d'euros dans le développement des vaccins, avec la création d'une nouvelle usine en France et 200 emplois à la clé.
A l'inverse de plans sociaux officialisés dans d'autres entreprises ces dernières semaines, les réductions d'effectifs annoncées vendredi ne répondent pas à la crise liée au Covid-19. Sanofi a au contraire tiré parti de la demande accrue de médicaments pendant la pandémie, avec notamment un bond de 20% des ventes de Doliprane. De quoi faire grimper son chiffre d'affaires de 6,9% au premier trimestre 2020. Et le groupe a prévu de distribuer pas moins de 4 milliards d'euros de dividendes à ses actionnaires, à contre-courant de nombre de sociétés ayant limité leurs versements. Mais malgré sa bonne santé financière, le groupe a engagé un plan d'économies de deux milliards d'euros d'ici à 2022, annoncé en décembre 2019. Et ce en arrêtant notamment sa recherche dans le diabète et le cardiovasculaire.
Selon Jean-Louis Peyren, coordinateur adjoint de la CGT chez Sanofi France, ces annonces reflètent le désengagement de l'entreprise de secteurs jugés peu rentables, au détriment d'impératifs de santé publique.
Marianne : Dans quelle stratégie s'intègrent ces suppressions de postes ?
Jean-Louis Peyren : Sanofi et les autres laboratoires ont le profit comme seule obsession, ce qui les pousse à abandonner des pans entiers de la recherche. Les vaccins rapportent par exemple davantage que la synthèse chimique de médicaments. Après avoir délaissé les antibiotiques, le groupe va faire de même avec le cardiovasculaire et le diabète. Cette évolution des priorités est déjà perceptible à l'intérieur de l'entreprise. Chez Sanofi, cela fait 15 ans que l'on a un plan social ou de départs volontaires par an.
Quelles conséquences peut-on craindre de ce désengagement ?
C'est une catastrophe pour la santé publique. On va peut-être laisser mourir des gens parce que les labos privés ne veulent pas s'intéresser aux antibiotiques, alors que les bactéries y sont de plus en plus résistantes. Dans ce domaine, Sanofi a cédé ses activités de recherche à Novotec, une petite entreprise qui n'a pas les mêmes moyens en termes de R&D [Recherche et Développement]. D'une manière générale, les gros laboratoires font de moins en moins de recherche en interne, et s'appuient sur des start-ups en leur faisant assumer le risque. Ils se servent aussi de partenariats avec la recherche publique pour trouver des molécules.
Cette évolution menace-t-elle la politique de santé française ?
Des laboratoires étrangers reprennent les pans de recherche délaissés par les laboratoires français, par exemple en Chine ou aux Etats-Unis. Soit autant de perte de contrôle pour la France. Cela s'inscrit dans un contexte de forte concurrence du marché des médicaments à l'international, avec une lutte impossible contre les produits asiatiques.
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