Toujours plus de dopamine, de plaisir, de consommation... Le striatum, notre cerveau archaïque, en redemande toujours plus, conduisant l'espèce humaine aux pires erreurs et même, désormais, à la catastrophe terminale.
Tout a commencé sur une route isolée dans l'est canadien. Sébastien Bolher, docteur en neurosciences et rédacteur en chef de la revue Cerveau & Psycho, avait organisé un trekking de deux semaines avec ses cousins. Mais il avait sous-évalué le stock des provisions. Les quatre derniers jours, les marcheurs n'avaient plus que le sucre qui était collé au fond des sachets en plastique de leurs desserts. Lorsque Sébastien, affamé, regagne l'hôtel et la civilisation, il se rue « comme un ogre » sur le frigo et engloutit avec un plaisir infini des pancakes au sirop d'érable et tout ce qu'il trouve. Une heure plus tard, c'est l'indigestion. Il devra garder le lit un jour de plus.
Son expérience personnelle illustre un péril sous estimé : « Si nous sommes programmés depuis longtemps pour manger sans faim, pour en demander toujours plus sans capacité de modération, où résident les circuits qui déterminent ce comportement ? » Sébastien Bolher affirme, dans son essai intitulé le Bug humain (Robert Laffont), et avec une tranquillité et un humour glacé de thanatopracteur, que le cerveau humain programme la propre destruction de l'espèce.
BÊTISE ENTÊTANTE
L'humanité va tout droit dans le mur. Bêlante, pressée, mais follement heureuse car la dopamine, ce neurotransmetteur du plaisir et activateur du renforcement de la récompense, coule à flots dans ses neurones insatiables. Le sexe et la bouffe, l'idée de la récompense rapide, la comparaison sociale (se situer et dominer l'autre) sont des facteurs surpuissants de recherche de plaisir inscrite au fin fond de notre cerveau depuis 200.000 ans, le fameux striatum. Celui-ci est composé, nous dit la littérature scientifique, du noyau accumbens, du noyau caudé et du put amen, et approvisionné en dopamine par l'aire tegmentale ventrale.
« Leurs instances décisionnaires innervent pratiquement toutes les régions du cortex où siègent la raison, l'esprit de planification, d'organisation, d'abstraction, et même la mémoire », décrit Bohler. Huit milliards de cerveaux menés par le bout du nez. Le striatum nous conduit aux pires conneries : toujours plus de dopamine, de plaisir, de consommation, de dévoration de la planète. Pourquoi, s'est demandé Bohler, les vidéos porno et celles des chatons sont-elles les plus visionnées sur le Web ? Car elles libèrent des stimuli qui injectent immédiatement des émotions positives. Le biotope numérique adonné une seconde jeunesse à ce cerveau shooté comme jamais.
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