jeudi 20 août 2020

Les journalistes cachent les atrocités palestiniennes...



Manfred Gerstenfeld interviewe Els van Diggele
« Le « Journalisme en campagne » est un terme fondamental de mon nouveau livre : The Misleidingsindustrie (The Misleading Industry). Cela fait référence à la façon dont les médias des principaux courants d’opinion en Hollande rapportent les faits à propos d’Israël, des Palestiniens et de la région, depuis l’intérieur des Pays-Bas. C’est la résultante d’un « Journalisme en campagne », un certain tyep de journalisme qui est fondé sur l’engagement personnel et ne traite pas foncièrement des faits.
« Cette façon de façonner le reportage est très commun parmi les médias des principaux courants d’opinion. Elle se résumé  à décrire les Palestiniens comme les pauvres victimes d’Israël, et à présenter une image négative de l’Etat Juif. Pourtant, j’insiste pour ne pas vouloir donner l’impression que cela seraiit imposer intentionnellement ».
Els van Diggele est née en 1967 (année de la Guerre des Six-Jours) dans le village néerlandais de Warmond. Après ses études en Histoire à l’Université de Leiden, elle a suivi une formation post-doctorale de journalisme à l’Université Erasmus de Rotterdam. Elle a publié trois livres sur les controverses et conflits internes en Israël et dans les territoires palestiniens, entre les Juifs, les Chrétiens et les Musulmans. Récemment, elle a publié un livre sur l’un des très rares survivants de la Shoah encore en vie.
Els van Diggele poursuit : « Je ne suis qu’une observatrice et non une participante. Pour être tout-à-fait claire, je ne suis pas une adepte de Netanyahu, pas plus une Sioniste, encore moins une négatrice de la Naqba, ni je ne travaille pour l’Ambassade d’Israël ou le Mossad ». Elle ajoute : « Pour être encore plus claire, je ne plaide pas pour le dénigrement des Palestiniens (bashing) ».
Ces remarques débouchent naturellement sur la question consistant à savoir pourquoi elles semblent nécessaires ou pourquoi l’interviewée les considère comme indispensables? Van Diggele réplique : « Du fait de la polarisation du sujet, on doit rendre ces choses-là parfaitement claires. Par expérience, je sais qu’il est préférable de donner une information d’avance sur les gens qui veulent me coller une étiquette ».
« Le terme de « journalisme en campagne » a, pour autant que je m’en souvienne, été forgé autour des années 1970 par Jérome Heldring, un ancien rédacteur en chef du quotidien néerlandais : NRC Handelsblad. Il disait d’ailleurs que le Journalisme en campagne était un euphémisme pour parler de propagande. Il en va du devoir du journaliste de relater honnêtement la réalité de l’endroit  où il (ou elle) est stationné(e).
« Ce journalisme en campagne » survient, dans la plupart des cas, inconsciemment. Il est largement du ressort de l’instinct. Habituellement, il semble être la conséquence d’un engagement émotionnel. Pourtant, le département étranger d’un organe de presse, qui ne serait pas alerté quant à ce phénomène, c’est peut-être pire même que de tromper intentionnellement les gens.
« Dans mon livre, je démontre que les lecteurs des médias des principaux courants d’opinion, les spectateurs ou les auditeurs des bulletins publics d’actualité, sont les otages et victimes de journalisme de campagne. Ce genre n’est absolument pas confiné aux reportages sur Israël et les Palestiniens. C’est, en fait, un phénomène largement répandu qui s’applqiue aussi à d’autres sujets comme le colonialisme, Srebrenica et la dérégulation climatique. Le conflit entre Israël et les Palestiniens est le meilleur et le plus ancien exemple que nous ayons : il trace un profond clivage au sein de la société néerlandaise.
Dans les médias classiques, on décrit bien moins les luttes de pouvoir internes palestiniennes, fréquemment sanglantes et la répression des Palestiniens ordinaires par leurs propres leaders, que ce qui se passe du côté israélien, même si c’est bien plus anodin. L’infinie patience envers les dirigeants palestiniens, souvent représentés sous les traits de colombes de la paix, semble devenue une marque de fabrique. Le consommateur d’actualité est informé de façon unilatérale depuis des décennies. Les dégâts provoqués sont très difficiles à corriger. Le quotidien NRC dupe le public dans ce domaine déjà depuis des années. Ce journal n’est, cela dit, qu’un exemple de ce qui se passe. C’est un produit commercial, aussi pouvons-nous juste nous en désabonner. Mais concernant le programme de la chaîne publique NOS, on ne peut rien faire.
« Il y a, en effet, quelques rares articles qui déclarent la vérité, en particulier, si c’est un Palestinien qui l’écrit. Par exemple, un article critique de l’universitaire palestinien Sari Nusseibeh, est paru dans le quotidien Volkskrant en 2017. Durant la même année, un autre quotidien hollandais, Trouw, a publié un article objectif du journaliste palestinien Khaled Abu Toameh. En outre, les publications de Human Rights Watch sur les violations des droits de l’homme dans la société palestinienne attirent, de temps en temps, l’attention des journalistes hollandais. C’est encore plus rare quand on découvre un article teinté de critique de la société palestinienne écrit par un journaliste de son propre journal.
« En 2017, l’Irak a enlevé la citoyenneté (irakienne) à tous Palestiniens qui vivaient dans le pays. Les médias européens ont à peine prêté attention à cette marque d’exclusion. C’est un exemple typique de l’expression journalistique anglo-saxonne : « No Jews, no news » (pas de Juifs, pas d’info). L’obsession envers les Juifs est une ancienne déviance de la boussole morale européenne. Les conflits où des Juifs sont impliqués reçoivent d’habitude la plus haute priorité de la part des rédacteurs. Cela conduit à de nouvelles déformations des faits.
« Les Palestiniens ont compris qu’ils n’ont aucune valeur informative sans l’implication de Juifs. Ils savent que les manifestations à Gaza à la frontière avec Israël font toujours sensation (de bons papiers ou de bonnes images). Il n’y a aucun indice que les correspondants bataves comprennent que les Palestiniens les manipulent. Leur implication instinctive éclipse leur jugement.
« Si l’amour du journaliste européen pour les Palestiniens découle de son aversion pour les Juifs et Israël, c’est aussi largement inconscient. Je pense que cela ne joue qu’un rôle mineur. L’obsession européenne générale, consciente ou inconsciente, pour les Juifs et Israël joue un rôle bien plus important. Nous devrions être parfaitement au courant que la sympathie pour les Palestiniens à laquelle nous assistons dans les grands médias européens est directement en relation avec cette idée fixe. Cette fixation est commune à la culture occidentale depuis des siècles. Ce à quoi nous assistons à présent poursuit ce même assujettissement, sans que ce soit intentionnel, et peut-être même instinctivement.
« Les Palestiniens ont obtenu une fonction symbolique dans les médias. L’empathie est devenue un signe de justice morale. D’autres nations qui ont souffert ne possèdent pas cette fonction symbolique. Les fonctions symboliques ne sont pas relatives (aux situations réellement vécues) ou interchangeables.
« Pour ne mentionner qu’un exemple significatif en Hollande : les gens des Moluques, un groupe insulaire d’Indonésie, sont les victimes du colonialisme néerlandais. Ils ont subi l’exploitation la plus impitoyable de toute l’histoire. Une partie d’entre eux sont réfugiés, d’autres sont indigènes et exotiques. Ils combattent en vain depuis des décennies pour obtenir leur propre Etat. Ils pourraient être qualifiés pour bénéficier d’une histoire puissante de solidarité. Cela n’existe pas parce que sa principale opposante, la République Indonésienne, est aussi considérée comme une victime des longs siècles de colonialisme néerlandais.
« Un gros problème supplémentaire, aux Pays-Bas, concerne la NOS. Depuis des décennies ce producteur d’informations à l’intention du public fournit des actualités biaisées. Il devrait y avoir une enquête indépendante sur la façon dont la NOS traite le conflit palestino-israélien. Pourtant, l’éventualité que cela arrive est très maigre. Deux choses ne sont pas autorisées dans les principaux médias hollandais : Ne touchez pas aux Palestiniens et ne critiquez pas les médias ».
Van Diggele explique : « On peut tout mentionner dans les journaux, à la radio et à la télévision hollandais : les politiciens et autorités défaillants, l’adultère et le sexe. Une chose n’est pas permis : le Palestinien ne peut en aucun cas faire l’objet de critiques. Il n’est que la victime impuissance et indiscutable de cinquante ans d’occupation palestinienne. Il mérite la protection , ce qui nous amène automatiquement au journalisme : les journalistes peuvent écrire sur tout, mais malheur à ceux qui ont un œil critique sur l’état général du journalisme.
« Lecteurs, auditeurs et spectateurs des médias dominants en paient le prix. Ils donnent leur suffrage au journaliste, en pleine confiance. Cette confiance a gravement été mise à mal. Ils escomptent recevoir le récit entier de ce qui se passe, mais ils n’obtiennent simplement qu’une version à moitié déformée. Dans ces conditions, est-ce qu’un point de vue équilibré est seulement possible? Probablement pas. C’est sur cette injustice que je veux attirer l’attention ».
Els Van Diggele est interviewée par Manfred Gerstenfeld
Le Dr. Manfred Gerstenfeld est Président d’honneur du Centre des Affaires Publiques de Jérusalem. Il a été conseiller stratégique pendant plus de trente ans pour certaines des corporations dominantes dans le monde occidental.  Le prix du Lion de Juda, de l’Institut Canadien de Recherche Juive fait partie des récompenses qu’il a obtenues, lui attribuant le titre d’Autorité internationale dominante en matière d’Antisémitisme Contemporain. Son principal livre sur le sujet  est : The War of a Million Cuts The struggle against the delegitimization of Israel and the Jews and the growth of New antisemitism.
Adaptation : Marc Brzustowski.

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