jeudi 30 juillet 2020

L'ANTISÉMITISME " OFFICIEL " EN POLOGNE L'ÉCHEC D'UNE PROVOCATION...

Antisémitisme — Wikipédia

Le témoignage qu'on lira ci-dessous apporte une indispensable lumière sur l'antisémitisme officiel qui sévit en Pologne. L'auteur avait trois ans lorsqu'en 1943 elle fut, avec ses parents, emmenée du ghetto de Varsovie à destination du camp de Treblinka. En sautant du train en marche, sa mère se tua pendant qu'elle même parvenait à rejoindre Varsovie avec son père. Celui-ci, traqué par la Gestapo, se donna la mort. La fillette fut recueillie par une Polonaise qui l'adopta et lui donna son nom, Stanislawa Karsov-Szymaniewska. 
C'est à ces circonstances qu'elle dut d'ignorer son origine juive.Licenciée en philosophie, collaboratrice de l'Académie polonaise des sciences puis du musée Adam Mickiewicz, Nina Karsov devint la secrétaire de M. Szymon Szechter, écrivain, ancien officier de l'armée rouge pendant la guerre, ayant perdu la vue au front. La censure refusa ses " Récits russes ", et la revue " Swiat ", qui avait entrepris de les publier, dut interrompre la publication.Pendant que son appartement devenait un lieu de rendez-vous des intellectuels contestataires, M. Szymon Szechter commença en 1965, avec Nina Karsov, la rédaction du " Journal " qui leur valut à tous deux d'être arrêtés. L'accusation classique de " menées sionistes " devait prendre d'autant plus de poids que Nina Karsov ignorait qu'elle était juive. Quantité de juifs polonais ont dû quitter la Pologne sous la même accusation. Quant à Nina Karsov, elle épousa M. Szymon Szechter alors qu'elle se trouvait en prison, puis fut libérée en septembre 1968 après avoir purgé les deux tiers de sa peine, et tous deux prirent le chemin de l'exil en novembre 1968, profitant de " facilités " dont il est annoncé qu'elles prendront fin à l'automne prochain..
J'ai vécu en Pologne durant vingt-six ans. Durant vingt-six ans on m'a regardée comme polonaise, durant vingt-six ans j'ai ignoré que j'étais une enfant juive sauvée d'un convoi de la mort, et qui devait la vie à de nombreux Polonais; nombreux, car pour une vie juive sauvée, dans un pays où, en sauvant un juif, on encourait la peine de mort, il fallait le courage de nombreux Polonais.
Lorsque, le 11 août 1966, je fus arrêtée par la police secrète politique, sous l'inculpation d'" activité hostile à l'État ", j'ignorais que j'étais juive. La police, elle, le savait, mais préférait passer la chose sous silence... Je commencerai toutefois par le commencement.
En mai 1965, Szymon Szechter entreprit la rédaction du Journal, essai sur la situation politique en Pologne. En même temps nous décidâmes de rassembler, en commun, matériaux et documents qui pourraient témoigner, dans l'avenir, de la restauration du stalinisme en Pologne, ainsi que de la lutte pour le pouvoir que se livrent, au sein du parti, le général Moczar et M. Gomulka.
Lorsqu'on perquisitionna chez nous, en août 1966 ,on découvrit le Journal de Szymon Szechter, l'original de la Lettre ouverte au parti de Jacek Kuron et Karol Modzelewski, qui a valu à ses auteurs une condamnation à trois ans de prison, les sténogrammes de procès politiques qui se sont déroulés dans les années 1965-1966 (notamment le procès de Kaziemierz Badkowski, Ludwik Hass et Romuald Smiech), des documents relatifs à ces procès, des tracts, un enregistrement de l'œuvre satirique les Silencieux et les Oies, ou Bal chez le président. Opéra en trois actes, avec ouverture et prologue, œuvre jugée digne, par les autorités polonaises, de trois ans de prison pour son auteur, Janusz Szpotanski. On confisqua également un projet de pétition adressée au Conseil d'État (1), demandant l'amnistie des prisonniers politiques, et toute une série d'autres documents.
Trouver les " complices "
Je fus emprisonnée. Szymon Szechter, lui, fut relâché au bout de quarante-huit heures. Une instruction, qui dura dix mois, fut ouverte contre nous deux.
Pour l'équipe chargée de l'instruction, il ne s'agissait pas tant d'établir notre culpabilité que d'identifier les " autres ", nos prétendus collaborateurs, et de découvrir la provenance des documents saisis. On cherchait les " autres " surtout parmi les héros du Journal.
https://www.lemonde.fr/archives/article/1969/07/18/l-antisemitisme-officiel-en-pologne-l-echec-d-une-provocation_3058645_1819218.html

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