L’abbé Arbez a écrit ce texte il y a une vingtaine d’années. Pourquoi relever ce détail ? Parce que nous sommes au temps du relativisme, du « girouetisme », où tout fluctue selon l’air du temps et inversement. Cependant, des esprits clairs aux idées solides tiennent le cap sans ciller ni se perdre, parce qu’ils défendent des points de vue éternels. Eternel comme le peuple juif – Jean-Patrick Grumberg.
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Selon le cardinal Schönborn, « c’est un fait aussi bien pour la foi juive que pour la foi chrétienne, qu’il y a eu une fois et une fois seulement, dans l’histoire de l’humanité, un pays, un pays bien déterminé, dont Dieu a pris possession pour toujours, comme étant Son héritage (1S, 26/19) Son pays (Jr 2/7) et qu’il a confié au peuple élu par Lui, Israël, comme étant Son propre peuple (Dt 1/36) »…
L’archevêque de Vienne poursuit: « on ne peut guère mettre en doute que la fondation de l’Etat d’Israël soit liée à la promesse biblique de la terre« . (Rappelons pour mémoire que le Saint-Siège a signé sa reconnaissance de l’Etat d’Israël dans un Accord fondamental en 1993).
Cet éclairage théologique et historique élémentaire fait encore souvent défaut à de nombreux Chrétiens, peu conscients du fait que l’Eglise du Christ est enracinée dans le judaïsme, et que, comme l’a rappelé tant de fois Jean Paul II, et ensuite ses successeurs, le destin du christianisme est intimement lié à celui du judaïsme.
Quand les Chrétiens ne sont pas capables de reconnaître la réalité incontournable de l’Etat d’Israël comme prolongement historique de la promesse de la terre au peuple élu, ils ne respectent pas l’identité spirituelle et historique de leurs frères juifs tant éprouvés au cours des siècles. Plus encore, ils scient de manière suicidaire la branche sur laquelle ils sont greffés ! Or le christianisme n’est pas un état d’âme humaniste flottant au gré d’idéologies du moment, c’est une religion, profondément ancrée dans le judaïsme, et en dehors duquel elle n’a aucun sens. La terre d’Israël fait partie de l’alliance entre Dieu et son peuple, sinon la Bible n’est qu’un livre de contes de fées.
Il faut admettre que les événements du Proche-Orient, tels qu’ils sont relatés par les médias occidentaux, brouillent fatalement la perception de ce double enjeu de la survie d’Israël, pour les juifs d’abord, pour les chrétiens ensuite. Dans la plupart des cas, on entend répéter mécaniquement des appréciations du conflit formatées par une surenchère médiatique quotidienne clairement disproportionnée et visiblement orientée. Les exemples surabondent !
A suite des circonstances de l’histoire de ces vingt derniers siècles en Terre sainte, voici que deux peuples revendiquent une seule terre.
Israël/Palestine
A quoi cela correspond-il ? Il faut d’abord rappeler en préalable que si l’on parle des Israélites et d’Israël depuis 3500 ans, il n’a en revanche jamais existé d’Etat palestinien ni d’Etat arabe…
Les cartes géographiques actuelles de divers pays arabes et musulmans, (y compris dans les livres scolaires des élèves des Territoires sous autorité palestinienne) mentionnent le nom de PALESTINE pour toute la région qui va de la Méditerranée au Jourdain; mais, visiblement, Israël n’y figure pas ! …
Cette affirmation de la palestinité régionale prônée par l’OLP et par le Hamas dans leurs chartes judenrein résiste-t-elle à une analyse historique ? Cette option politique est-elle ethnique, religieuse?
S’appuie-t-elle sur une réalité effective ou imaginaire ?
La bible
Le nom d’Israël gravé sur la stèle du pharaon Meneptah, successeur de RamsèsII, est daté de 1200 avant notre ère.
Cet indice archéologique est important pour comprendre la suite, car cela signifie qu’un ensemble de populations vivant en terre de Canaan, devenue Eretz Israël pour s’affranchir de la tutelle égyptienne, a émergé comme réalité politique sous la forme d’une confédération de tribus sémitiques.
Un peuple hébreu autochtone, déjà près de dix-huit siècles avant notre ère, avec Abraham, existait donc dans le pays de Canaan. La dynamique d’une alliance entre Dieu, son peuple et sa terre avait donné la paix pour seule ambition à cet Israël en gestation, autour d’une éthique authentiquement d’avant- garde par rapport aux civilisations environnantes, mais aussi grâce à un culte original, en lutte permanente contre les idoles et les dépendances nuisibles qu’elles impliquent.
Ainsi, lorsque nous ouvrons la Bible, premier ou nouveau Testament, nous voyons qu’il y est question du pays des Juifs, de la Judée, d’Eretz Israël, et de pays voisins infiniment plus puissants et constamment envahisseurs. Mais l’appellation « Palestine » n’apparaît pas !
Les Philistins
Le terme moderne « Palestinien » vient de « Philistin« ; c’est sous ce nom que la Bible évoque des populations étrangères localisées dans une bande de terre côtière correspondant à l’actuelle bande de Gaza. Les Philistins de l’antiquité sont des navigateurs venus des îles de la mer Egée; c’est-à-dire des Grecs. Leur langue est une langue indo-européenne, mais pas une langue sémitique. Les Palestiniens d’aujourd’hui qui revendiquent depuis 1967 la palestinité ne sont visiblement pas les descendants de ces anciens Philistins, mais sont issus de populations arabes et turques ne remontant visiblement pas jusqu’à cette époque antique.
- Yehuda :
La première mention de Palestine, ou Philistie, contrée peuplée de Philistins, remonte à Hérodote, quelque cinq siècles avant notre ère, mais cela ne vise aucunement l’ensemble du territoire des Juifs: celui-ci reste appelé pour la partie nord: Israël, et pour la partie sud: YEHUDA, Judée, Juda, c’est-à-dire pays des Juifs, dans les édits et sur les pièces de monnaie frappées par les gouverneurs perses au 4ème siècle av. J.-C.. - Judea Capta :
A l’époque de Jésus de Nazareth et de ses disciples, tous Juifs, il y a deux mille ans, évidemment personne ne parle de « Palestiniens« . On ne connaît que les Philistins, peuple guerrier ennemi d’Israël, et venu de la mer dÊgée, pas du désert d’Arabie ! (D’où l’absurdité anachronique de ces catéchismes qui nous parlent de « Jésus sur les chemins de Palestine« … Cela concorde avec le mythe islamique d’un Jésus palestinien, en harmonie avec le Coran, qui récupère Jésus comme prophète musulman ! Or Jésus est né juif à Bethléem de Judée, et mort juif à Jérusalem ; pour les Chrétiens il est Fils de Dieu.)
En 70 de notre ère, Titus, fils de l’empereur Vespasien, détruit le Temple de Jérusalem et réprime violemment le peuple juif. A cette époque, on trouve des pièces romaines représentant une femme juive en deuil, sous un palmier, symbole de la Judée: l’inscription est « Judea capta », la Judée conquise; ce n’est pas « Palestina capta« … - Palestina :
C’est après la deuxième révolte juive contre Rome, en 135, que l’empereur Hadrien débaptise la Judée pour l’appeler PALESTINA, (du nom de la bande côtière philistine), tout comme il change, également, le nom de Jérusalem, qu’il a fait raser, en Aelia Capitolina. Il massacre et déporte une grande partie des habitants. Si Rome interdit provisoirement aux Juifs l’accès à leur capitale millénaire, en Judée/Palestine la majorité de la population reste néanmoins juive, malgré la présence de quelques colons grecs et romains, et elle peut continuer à vivre et à pratiquer ses coutumes sur sa terre ancestrale Eretz Israël. - Les Byzantins :
La foi en Jésus Messie, qui a commencé à se développer dans les milieux juifs et chez les sympathisants du judaïsme, s’hellénise peu à peu; alors que le premier christianisme est 100% juif, une structuration de la pensée chrétienne s’opère peu à peu avec les outils intellectuels de la philosophie grecque; or, à la suite des premiers conciles d’évêques, en majorité orientaux, des exclusions sont prononcées contre les Juifs, sur la base d’élaborations théologiques douteuses, avec cette idée que l’Eglise s’est substituée à Israël, (« Verus Israel », expression absente du Nouveau Testament !) et que donc toute la religion juive est rendue caduque par le christianisme. Ce qui n’est pas une véritable doctrine, mais une simple coutume de pensée spirituellement illégitime. Ce christianisme feint de croire qu’il s’est auto-généré !
En dépit de cela, il apparaît que, durant plusieurs siècles, la plupart des Chrétiens de la base populaire restent en excellents termes avec les Juifs et participent même fréquemment aux célébrations dans les synagogues; et c’est sans doute à cause de ces trop bonnes relations que, par crainte d’une influence concurrente du judaïsme, certains hiérarques et notables orientaux vont instituer une distance fatale en élaborant la notion de peuple « déicide« , ce qui induira tant de tragédies sanglantes par la suite..
La « conversion » de l’empereur Constantin à la foi nouvelle en 324 donne force de loi à ces redoutables attitudes de rejet, et un statut des Juifs, y compris en Terre Sainte, est établi. Mais cela n’affecte pas outre mesure la population judéenne et samaritaine, qui, majoritaire dans le pays, garde intacte la jouissance de ses terres durant cette période byzantine. En effet, les Chrétiens ne dépossèdent pas les Juifs de leurs biens et ne répriment pas leur expression culturelle: c’est même dans ce contexte de présence chrétienne que le Talmud est écrit. C’est aussi à ce moment que St Jérôme vient de Rome en Terre Sainte pour travailler auprès des rabbins à sa traduction de la Bible (la Vulgate), avec le souci de respecter le plus possible la « veritas haebraïca« , malgré l’hostilité de St Augustin à son égard…
De nombreuses synagogues sont même construites durant cette période, particulièrement en Galilée, et l’approfondissement de la Mishna se poursuit, tandis que parallèlement les Pères de l’Eglise rédigent leurs réflexions théologiques et que prend forme ce qui constituera le droit canon ecclésiastique.
Mais l’Eglise de Palestine durcit ses positions, elle interdit aux Juifs de vivre à Jérusalem, et laisse transformer le site sacré du mont du Temple en dépôt d’ordures et en décharge publique. Les Juifs ne sont autorisés à entrer à Jérusalem qu’une fois par an pour pleurer sur la destruction de leur lieu sacré par les Romains. - L’arrivée de l’Islam:
La situation va complètement changer lorsque, après cette période marquée par une relative coexistence avec les Chrétiens byzantins, les adeptes d’une nouvelle religion conquérante, l’islam, sortent de leur territoire, l’Arabie, aux 7ème et 8ème siècles. Et en très peu de temps, « tels une invasion de sauterelles« , pour reprendre l’expression du chroniqueur Ibn Khaldoun, les Musulmans vont s’installer en Terre Sainte, en Egypte, en Syrie, au sud de l’Italie, en Afrique du Nord, en Espagne, en Arménie, en Anatolie, en Perse, en Inde, au prix de massacres et de bouleversements considérables, totalement occultés par les recensions historiques et par les manuels d’histoire à l’usage des scolaires.
Leur occupation de l’Espagne et de l’Arménie provoquera d’ailleurs en Occident au 11ème siècle une réaction déclenchant le processus de croisade, dans un but défensif de récupération des biens volés et non pas offensif par esprit de conquête, comme aiment à le raconter les versions islamiques puis marxistes de l’événement.
A leur arrivée à Jérusalem en 638, les Arabes s’emparent des espaces sacrés juifs et chrétiens et ils y installent deux mosquées (devenues récemment très célèbres) sur l’emplacement même du Temple de Salomon reconstruit par Hérode.
Diverses œuvres d’art appelées à tort « art islamique » vont être conçues et réalisées par des architectes et artisans chrétiens ou juifs, recrutés de force par les conquérants. (C’est le début de l’appropriation par les Musulmans du riche héritage byzantin et copte au Proche-Orient.) - Juifs et Chrétiens opprimés:
Si pendant des siècles, les Juifs subissent sur leur territoire ancestral les contrecoups d’un antijudaïsme chrétien, (avec la présence des Byzantins du 5ème au 7ème siècle, puis des Latins, du 11ème au 12ème siècle) ils souffrent surtout des conséquences de l’islamisation du pays, avec l’arrivée des occupants musulmans, arabes puis ottomans. Il faut encore relever l’attitude hostile du patriarche de Jérusalem, Sophronius, qui, s’appuyant sur les allégations exécrables de Jean Chrysostome, demande en 638 au calife de maintenir l’exclusion des Juifs de Jérusalem. Pourtant, le chef religieux accepte par marchandage qu’un quota de 70 familles s’y établisse.
Dhimmi
Avec cette conquête par l’islam au 7ème siècle, la situation se dégrade, aussi bien pour les Juifs que pour les Chrétiens, finalement soumis par l’islam au même régime d’infériorité (les dhimmis): leurs terres sont confisquées par le calife qui en devient le seul détenteur, au profit de la population musulmane (système du « fay« ). Pendant la période de conquête, les campagnes sont gangrénées par l’insécurité en raison des razzias bédouines, des déportations en esclavage des Juifs et des Chrétiens, et de ce fait, la désertification humaine et agricole s’accélère.
C’est dans cette conjoncture d’assujettissement que les Musulmans imposent aux non-Musulmans un vêtement discriminatoire, visibilisant leur statut inférieur. Voici donc l’ancêtre de l’étoile jaune, et de la rouelle reprise dans les décrets du 4ème concile du Latran (ségrégationniste envers les Juifs et les Musulmans en Europe, au 13ème siècle). Les musulmans occupant la Terre sainte exigent que les juifs portent un vêtement jaune…et les chrétiens, bleu.
En 1009, le sultan égyptien Al Hakim conquiert Jérusalem. Né d’une mère chrétienne convertie à l’islam, il s’acharne rageusement sur le tombeau du Christ, qu’il réduit en poussière. Mais dans sa furie Al Hakim ordonne aussi que les synagogues et les églises soient détruites, et il déclenche des persécutions contre les Juifs et les Chrétiens; les Occidentaux doivent donc payer des rançons considérables pour protéger leurs droits et reconstruire le Saint-Sépulcre.
Dans ce climat hostile, les décennies suivantes voient les pèlerins chrétiens, qui venaient depuis 10 siècles se recueillir en foule sur les lieux saints de Jérusalem, se faire agresser et mutiler par les musulmans (nez et oreilles coupés). Ils sont capturés, emmenés en esclavage, islamisés de force.
Devant ces états de fait intolérables, des ligues de « légitime défense » se constituent en Occident, pour tenter de donner une réponse collective à la situation d’ensemble qui s’aggrave de l’Espagne à l’Arménie. Les croisades (qui ne portent pas encore ce nom) sont lancées dans un but non pas expansionniste, mais simplement pour reprendre aux Musulmans les terres chrétiennes qu’ils s’étaient appropriées par l’épée.
Des troupes armées, constituées de pauvres gens, parfois organisées de bric et de broc mais déterminées par une cause juste et une foi intense, prennent dans le même élan la route de la Terre Sainte. Souvent épuisées par les attaques de brigands tout au long de leur périple, et affrontées à des barrages de cavaliers musulmans bien équipés, les croisades se donnent pour objectif (plus spirituel que militaire) de libérer le Tombeau du Christ, profané par les guerriers de Mahomet.
Mais il n’empêche que des Occidentaux aventuriers et fanatiques, infiltrés dans ces troupes populaires de Chrétiens en marche vers la Terre Sainte, commettent des exactions gravissimes en tuant des Juifs par antisémitisme, par exemple lors de leur départ d’Allemagne, et en massacrant par milliers Juifs et Musulmans lors de leur entrée à Jérusalem, tels sont les mœurs guerrières de l’époque.
Chute civilisationnelle et oubli total:
Toutefois, pendant de longues périodes, la Judée et Jérusalem vont tomber dans l’oubli; elles n’auront pas d’importance particulière pour l’islam, au contraire de ce qui apparaît depuis moins d’un siècle. (Rappelons d’ailleurs, à ce propos, que Jérusalem n’est pas mentionnée une seule fois dans le Coran ! Alors qu’elle est omniprésente dans la Bible.)
C’est Damas qui joue à cette époque le rôle de chef-lieu de l’administration musulmane de la région.
Il faut signaler aussi que durant les douze siècles qui ont suivi l’islamisation du pays, la population globale en Terre Sainte a terriblement chuté: des trois à quatre millions de personnes vivant là du temps du Christ, on tombe au 19ème siècle à seulement trois cent mille âmes, soit le 1/10ème environ, principalement en raison des attaques permanentes de pillards, conformément à la tradition bédouine des razzias.
On sait qu’au 16ème siècle des familles maures chassées d’Espagne sont venues s’installer en Palestine. Mais la désertification humaine du Pays de la Bible amène le sultan à y transférer à la fin du 19ème siècle des contingents musulmans provenant de Bosnie et du Caucase, pour servir de repeuplement d’appoint et de main d’œuvre au service des riches propriétaires syriens ou libanais, détenteurs de parcelles de terres ou de désert…
Quant aux « Arabes chrétiens » aujourd’hui présents dans ces territoires sous autorité palestinienne ou en Israël, certains d’entre eux se considèrent comme les descendants des apôtres et des premiers disciples de Jésus Christ, (pourtant tout ce qu’il y a de plus juifs !). Ils sont souvent originaires du Liban et de Syrie, de Jordanie ou d’Egypte, et appartiennent aux communautés grecques-catholiques ou grecques-orthodoxes. La plupart de ces familles, établies là peut-être depuis un siècle et demi, se présentent comme implantées dans la région depuis l’antiquité la plus reculée. Une petite minorité d’entre elles sont certainement des descendants d’Araméens chrétiens venus d’au-delà du Jourdain…
L’ère des guerres coloniales va faire prendre un virage décisif à ces colonies ottomanes arabisées. Car les Anglais et les Français se disputent la domination du Proche-Orient. Après avoir infligé une défaite militaire aux Turcs en 1917, les Anglais sont présents en Terre Sainte jusqu’en 1948.
En 1921, chargés par la Société des Nations d’un mandat sur la Palestine, ils vont effectuer le découpage de cet ancien territoire ottoman vaincu: c’est ainsi que les trois quarts du territoire de Palestine mandataire, la Transjordanie, à l’est du Jourdain(77%, exactement !) sont attribués à Abdallah, fils du sherif de La Mecque, promu émir pour la circonstance par les Anglais ; et c’est seulement le petit quart restant de la Palestine, (23%) entre Mer morte et Méditerranée, qui est prévu comme territoire à partager de nouveau entre les Arabes de Palestine et le futur foyer national juif!
Par la suite, les Britanniques, et avec eux les Occidentaux, font tout pour freiner au maximum le retour des Juifs sur « Eretz Israël » ! Toutefois, lorsqu’un journal intitulé « Palestine » paraît à cette époque, les Palestiniens dont il est question sont des Juifs qui continuent d’affluer en Terre Sainte… (A noter en passant que ce désir de retour, appelé alyah, a toujours existé au cours des siècles chez les Juifs, exilés de force de leur pays par vagues successives.)
Sous l’impulsion des militants sionistes, et malgré de violentes oppositions arabes relayées en Occident, l’état d’Israël voit le jour en 1948, avec l’aval des Nations unies. Mais les Arabes s’estiment dépossédés de leurs terres traditionnelles et refusent catégoriquement la partition territoriale proposée par les Nations Unies en novembre 1947. Les armées arabes voisines attaquent le jeune Etat moderne d’Israël, avec pour objectif non pas de s’installer à ses côtés, mais purement et simplement d’en éliminer la création, événement appelé par eux « nakba« , catastrophe.
Jusqu’en 1967, les Musulmans de ces régions ne s’appellent pas encore « Palestiniens ». Ils tiennent à être reconnus comme une part de la Nation arabe, et de la oumma musulmane, ils se font alors appeler « Arabes de Palestine ». C’est la logique du panarabisme, dans lequel de nombreux chrétiens arabes sont mobilisés au service d’une cause qui va se diversifier en courants islamiques multiples. Beaucoup n’hésiteront pas à utiliser la violence, sur la base de légitimations révolutionnaires d’inspiration marxiste ou coranique.
En 1967, c’est la défaite de la Jordanie et la reconquête par l’état hébreu de Jérusalem-Est ainsi que de la Judée-Samarie historique; c’est alors qu’apparaît une dénomination inédite forgée de toutes pièces : la « Cisjordanie », maintenant présentée dans les médias occidentaux comme « territoire occupé » depuis qu’Israël en contrôle les abords pour sa sécurité. Alors qu’étrangement la présence jordanienne n’était pas perçue comme « occupante » par les Arabes de Jérusalem et de Judée-Samarie, le passage à l’administration israélienne est ressenti par ceux-ci comme une humiliation, essentiellement pour des raisons « religieuses ». Pour la tradition coranique, « l’islam domine, mais n’est pas dominé ! »
Dans les années 70, la Ligue arabe impose au Liban l’accueil de nouveaux « réfugiés palestiniens » ; le cauchemar commence pour les régions chrétiennes libanaises qui seront ravagées par les agressions de commandos terroristes cherchant à déstabiliser le pays. Il y a le fameux massacre de Damour, où les commandos de Yasser Arafat enferment la population dans l’église du village et l’incendient faisant 670 innocentes victimes pour la « cause » palestinienne. Ces exactions, menées par les rescapés de « septembre noir » (de Jordanie), font des milliers de victimes parmi les Chrétiens et vont jusqu’au meurtre du président maronite du Liban, Bechir Gemayel, en 1983, sur les marches de son église.
C’est ce chaos qui entraîna, de la part des milices chrétiennes d’autodéfense libanaises, des interventions désespérées et des débordements incontrôlés comme le triste épisode de Sabra et Chatila, (coordonné par le syrien Elias Hobeïka) pour lequel le général israélien Ariel Sharon, stationné avec les troupes israéliennes dans les environs, a souvent été mis en cause.
Bien qu’aucun état palestinien n’ait existé auparavant, ce concept s’est peu à peu imposé à des opinions publiques occidentales sensibilisées et mobilisées par les courants progressistes, tant dans les milieux politiques que dans les cercles ecclésiaux tiers-mondistes de l’après-Concile. Durant des décennies, la revendication palestinienne va évoluer de plus en plus vers une problématique religieuse strictement musulmane, avec l’exigence d’Al–Aqsa, comme lieu saint de l’islam… (Jamais dans les siècles précédents, les mosquées de Jérusalem, Al Qods, n’avaient eu pareille importance symbolique !)
A ce propos, rappelons que l’emplacement de l’ancien Temple, avec le mur du Kottel, actuel lieu de mémoire sacrée et de prière juive, est le seul et unique lieu saint du judaïsme, tandis que l’espace supérieur, avec ses deux mosquées, revendiqué par les Musulmans, n’est que le troisième lieu saint de l’islam, après La Mecque et Médine.
Clés de compréhension:
Pour comprendre ce qui se passe en Israël/Territoires sous autorité palestinienne, il faut donc des clés de compréhension non seulement historiques, mais également géopolitiques et géoculturelles: il est également nécessaire de relier la politique locale du Moyen-Orient à ce qui se produit dans le reste du monde, où l’on a pu constater la progression fulgurante d’un islamisme militant. Voir l’Indonésie, les Philippines, le Nigéria, le Soudan, régions propices aux agressions islamiques contre les Chrétiens, sans oublier l’Algérie avec femmes et enfants égorgés au nom d’un islam plus pur, ou le Pakistan avec son fanatisme religieux. C’est ainsi que ces mêmes islamistes ont pris le pouvoir à Gaza par un coup d’état, ce qui fait qu’il y a deux palestines, celle de l’OLP et celle du Hamas…
Coexistence Israël/Palestine: respect mutuel.
Quoi qu’il en soit, les conséquences de l’histoire font qu’aujourd’hui des populations arabo-musulmanes à forte démographie sont maintenant présentes sur cette terre de Palestine. Avec la partition initiale de l’ancienne Palestine mandataire, en 1921, on sait que la population du Royaume de Jordanie est aux 3/4 « palestinienne ».
Suite aux diverses propositions de paix, ces populations sauront-elles entrer avec réalisme dans le processus d’une coexistence pacifique aux côtés de l’État d’Israël, dont la légitimité s’enracine très profondément dans cette région depuis les temps bibliques fondateurs ? (soit près de trois mille huit cents ans).
Tant que ces populations seront galvanisées par des courants religieux ancrés dans un islam refusant par principe la légitimité antérieure d’Israël au nom de celle plus récente de la « Terre d’Islam« , elles seront logiquement conduites à vouloir s’approprier, par l’intifada ou les attentats, la totalité des terres, « de la Méditerranée au Jourdain », (position du Hamas, et de pratiquement tous les groupes militants) Leur cartographie est parlante à ce sujet : Israël n’y figure jamais. Ce sera l’impasse, car dès lors, la stabilité pacifique de la région restera sans cesse hypothéquée par des antagonismes inter-musulmans, une agressivité envers les chrétiens et une hostilité envers les habitants d’appartenance juive.
Un avenir constructif ?
Il est clair qu’Eretz Israël a une place centrale dans la Bible commune aux Juifs et aux Chrétiens, et Jérusalem y est citée six cents fois. « Que ma langue reste attachée à mon palais si je t’oublie, Jérusalem » ! dit le psalmiste.
Malgré leur ignorance du sujet, les Chrétiens sont eux aussi directement concernés par le sort réservé à leurs frères aînés juifs, ainsi que par l’avenir global de cette région unique au monde, longtemps appelée terra sancta et qui dans la conjoncture actuelle risque de devenir un jour un Disneyland de l’histoire sainte.
Eglise Universelle et Eglise locale
Malheureusement, on ne peut que déplorer l’image de discorde que donnent d’abord d’eux-mêmes les Chrétiens désunis de Terre Sainte. Par ailleurs, la position soumise de l’Eglise locale (toutes confessions comprises) au nationalisme palestinien et à ses excès, instaure un blocage insoluble pour l’avenir. La distorsion criante entre la position politique partisane de l’Eglise palestinienne et l’orientation plus œcuménique de l’Eglise universelle s’aggrave et verrouille les perspectives d’avenir équilibrées qui auraient pu être sagement élaborées, tant avec les dirigeants israéliens que palestiniens.
On doit constater qu’on retrouve là la ligne traditionnellement antijudaïque et marcionite, à la différence des autres chrétientés d’Orient, comme en Egypte, ou au Liban par exemple. Ces positions de l’Eglise catholique locale regroupant essentiellement des Arabes chrétiens (moins de 2% de la population à Jérusalem !) posent problème, vues d’Occident.
Un document de la commission « justice et paix » de Jérusalem, publié sous la responsabilité de l’ancien Patriarche Sabbah en est l’illustration fâcheuse. Cette « Eglise palestinienne » fait constamment de la surenchère sur l’attitude du Saint-Siège, qui, lui, ne s’est jamais prononcé définitivement sur les répartitions de souveraineté à définir pour les lieux saints, la Ville et les Territoires, laissant ce soin aux négociateurs officiels représentatifs des deux parties et aux médiations d’instances internationales.
De quoi ces autorités chrétiennes locales sont-elles le porte-parole, lorsqu’en guise de caution elles s’affirment directement de la lignée des apôtres juifs de Jésus, tout en adoptant finalement les positions du Fatah, ou même en légitimant le Hamas, deux organisations fer-de-lance de l’islam ? Pourquoi des protestants évangéliques américains ne seraient-ils pas aussi représentatifs et aussi pertinents lorsqu’ils se déclarent, au nom de leur foi biblique, solidaires d’une souveraineté israélienne ?
Le mont du Temple est un lieu saint vital pour les Juifs; il est aussi par ses vestiges le témoin de la foi de Jésus, lui-même fervent pratiquant du Temple de Jérusalem. Un Jésus déjudaïsé ne serait bientôt plus qu’un triste avatar de musée, et l’Eglise chrétienne verrait son socle historique et théologique disparaître.
La dénomination de « troisième lieu saint de l’islam » revendiqué comme tel depuis une époque récente est lui aussi à prendre en compte, et la situation générale des Palestiniens dans les Territoires disputés ne laisse personne indifférent; elle appelle d’urgence des solidarités ainsi que l’exigence de solutions politiques par des accords négociés avec Israël, mettant ainsi fin à l’engrenage attentats/représailles. Les fonds attribués chaque année aux Palestiniens par l’ONU et par l’Union européenne sont considérables. Mais que peut bien négocier Israël, sans cesse ciblé par l’ONU, s’il est pris en étau entre les revendications unilatérales des factions islamiques et la pression internationale orchestrée par les cercles et partis progressistes ?
Sans oublier que le dialogue avec le judaïsme et avec l’islam doit être différencié : si le judaïsme est constitutif du christianisme, l’islam est étranger à sa foi. Or pour des raisons historiques, les alliances sur le terrain sont souvent paradoxales et contre-productives.
Dans les discussions, une conscience claire et reconnue des différences et des légitimités ne pourrait que favoriser les initiatives constructives. Mais aucune décision ne se fera sans la négociation, systématiquement refusée par la partie arabe. Juifs, Chrétiens, et Musulmans seront-ils capables de se donner des objectifs constructifs sur cette terre en effervescence, malgré le terrible poids du passé et les hypothèques de l’avenir ?
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez, prêtre catholique, commission judéo-catholique de la conférence des évêques suisses et de la fédération suisse des communautés israélites, pour Dreuz.info.
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