Question posée par Mario le 01/07/2020
Bonjour,
Vous faites référence à une note du New York Times qui a annoncé mardi que «Black» serait désormais écrit avec une lettre capitale dans le quotidien (ainsi que les articles passés où la même occurrence se retrouve).
Le journal explique avoir pris cette décision après avoir parlé à «plus de 100 membres» de sa rédaction, et consulté des collègues d’autres organes de presse. «Sur la base de ces discussions, nous avons décidé d’adopter ce changement et de commencer à capitaliser le mot "Black" pour décrire les personnes et les cultures d’origine africaine, aux Etats-Unis et ailleurs. Nous croyons que ce style transmet le mieux des éléments d’histoire et d’identité communes, et reflète notre objectif d’être respectueux de toutes les personnes et communautés que nous couvrons», écrivent dans cette note Dean Baquet et Phil Corbett, respectivement rédacteur en chef et directeur adjoint de la rédaction du titre.
Cette décision a été prise dans un contexte particulier après la mort de George Floyd, tué par un policier blanc, Derek Chauvin, fin mai aux Etats-Unis. Elle répond également à un mouvement de fond dans la presse américaine depuis quelques semaines. Avant le New York Times, l’agence de presse Associated Press avait pris la même décision. «Le noir en minuscule est une couleur, pas une personne», expliquait dans une note John Daniszewski, vice-président pour les normes au sein d’AP. Ajoutant : «Ces changements s’alignent sur la capitalisation de longue date d’autres identifiants raciaux et ethniques tels que Latino-Américain, Asiatique-Américain et Amérindien. Nos discussions sur le style et la langue tiennent compte de nombreux points, notamment la nécessité d’être inclusif et respectueux dans notre narration et l’évolution de la langue.»
Le Los Angeles Times, USA Today (et ses 260 rédactions à travers le pays) et NBC News ont également fait le même choix, tandis que l’Association nationale des journalistes noirs (NABJ) a demandé aux autres rédactions d’adopter les mêmes standards.
Comme le rappelle l’Associated Press, il y a près d’un siècle, le sociologue américain William Edward Burghardt Du Bois, dans une lettre envoyée aux médias, leur avait demandé de capitaliser le terme «Negro», alors utilisé de façon commune, estimant que la minuscule était «un signe d’irrespect et de racisme». En 1930, le New York Times avait adopté cette forme, estimant que c’était un «acte de reconnaissance et de respect pour ceux qui ont passé des générations en minuscule».

«Blanc» reste en minuscule


Concernant une éventuelle capitalisation du mot «blanc», l’agence de presse AP se pose encore la question. Le New York Times, de son côté, a tranché : «Nous conserverons le traitement en minuscule pour le mot "blanc". Bien qu’il y ait une question évidente de parallélisme, il n’y a pas eu de mouvement comparable vers l’adoption généralisée d’un nouveau style de "blanc", et il y a moins le sentiment que "blanc" décrit une culture et une histoire partagées. De plus, les groupes haineux et les suprémacistes blancs ont longtemps privilégié le style majuscule, ce qui en soi est une raison pour l’éviter.»
En France, la grande majorité des médias met une majuscule à «Blanc» et à «Noir», principalement pour des raisons grammaticales. C’est la règle du substantif qui s’applique en effet. «Par analogie avec les ethniques dérivés de noms propres, on met la majuscule à des noms qui désignent des groupes humains, par exemple d’après la couleur de leur peau ou d’après l’endroit où ils résident (lequel n’est pas désigné par un vrai nom propre)», détaille le Grevisse de la langue française.
C’est cette même règle qui est suivie depuis plusieurs années à Libé«A partir du moment où on l’utilise comme une ethnie, la règle des nationalités s’applique», explique Michel Becquembois, chef du service édition.
Cordialement Robin Andraca